La Ciotat, été 2016.
Écrivain de roman noir en résidence, Olivia (Marina Foïs) anime un atelier d’écriture pour sept jeunes gens en insertion – cinq garçons et deux filles. D’une durée de plusieurs semaines, le stage doit aboutir à l’écriture d’un roman noir, ancré dans la réalité et l’histoire de la ville, laquelle est marquée par son passé ouvrier, ses luttes et la fermeture des chantiers navals survenue trente ans plus tôt. Après un démarrage chaotique – aucun des jeunes ne s’imagine en écrivain – un consensus se dégage autour de ces thèmes, mais l’un d’eux, Antoine (Matthieu Lucci, remarquable pour son premier rôle), s’y oppose sans mâcher ses mots : la nostalgie et les bons sentiments ne l’intéressent pas, il choisit d’exprimer son anxiété et sa révolte par une écriture crue et agressive, et un comportement provocateur qui déstabilise le groupe et installe un malaise croissant. D’abord intriguée, l’auteur, Olivia, tente de ménager le jeune homme, de l’apprivoiser, mais, d’une scène à l’autre, l’agacement puis l’inquiétude gagne : la violence séduisante de son écriture ne couvre-t-elle pas une autre violence, celle explosive du passage à l’acte…
Avec ce huitième long-métrage, Laurent Cantet (Ressources humaines, Entre les murs…) poursuit dans la veine qui lui est propre, celle d’un cinéma largement documenté – presque documentaire – en prise aux réalités sociales contemporaines. Ici, le fossé entre une intellectuelle bien intentionnée et un, voire des jeunes désorientés, sans repère ni avenir défini, prêts à basculer dans la tentation extrémiste. Un ton juste pour un film remarquable. Et une morale : on ne sort jamais indemne d’un atelier d’écriture… Pierre Dechifre

 

 

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